BABELMED 2011


Reportage di Mondomix sul grande successo del Canzoniere al Babel Med di Marsiglia!

“Il Canzoniere si è esibito riscuotendo un successo senza precedenti”

Dans la nuit du 26 au 27mars, pour saluer le prince printemps, nous perdons une heure dans notre horloge occidentale. Lors de l’ultime soirée du festival Babel Med Music 2011 ce sacrifice est largement compensé par une augmentation d’intensité émotionnelle due au groupe italien Canzoniere Grecanico Salentino amené à Marseille par l’association Puglia Sounds.


 

 

En bas, sur la peau du tamburello jaillissent des battements vifs et réguliers, comme un cœur immense qui bat la chamade et danse avec ivresse au nom de l’amour. Tout en haut, une voix aigüe, un peu nasale délivre une mélodie intense qui trace des loopings. L’esprit s’emballe. A mi hauteur, guitare battente, accordéon, cornemuse zampogna ou harmonica complètent avec entrain les harmonies, la rythmique et le chemin qui conduit de la terre au ciel.
Dans les rangs de la foule, la transe de la pizzica ébauche son action. Les sourires s’éveillent, les pieds se soulèvent du sol, coeur, corps et âme tourbillonnent sur le même tempo.

 

Ce n’était pourtant pas gagné! En trois soirées, la salle des sucres, la plus grande des trois aménagées pour Babel Med Music, a largement assit sa réputation d’inconstance phonique. Elle nous a plus souvent offert le pire son que le meilleur.
Bienheureux le groupe Canzoniere Grecanico Salentino qui a importé des Pouilles son propre ingénieur du son. Fin connaisseur des musiciens qu’il accompagne et rompu aux conditions sonores parfois épiques des salles italiennes, il a su faire face aux nombreux dangers réverbératoires et vibrionnants, tapis dans cet ancien entrepôt sucrier des Docks des Suds.

Sur scène 6 jeunes musiciens virtuoses et une espiègle danseuse aux voiles carmin maîtrisent nos émotions.
Un émoi qui nous ramène aux temps les plus reculés. Cette danse, ce rythme sont liés à un rite de possession païen voir dionysiaque qui n’a cessé de se pratiquer dans le sud italien, même après son interdiction par l’église. Le mythe de la tarentule dont la piqûre insufflait à sa victime un poison dont seule une transe dansée pouvait annihilée les effets. Les bien pensants ont beau avoir essayé de transformer la tarentelle en musique de cour en lui ôtant son rythme et son sens, sa forme initiale a survécu en cachette conservant son pouvoir attractif et salutaire. Largement relancé dans l’Italie contemporaine par une poignée de musiciens, cette pratique musicale et festive a aujourd’hui pris une ampleur comparable à celle des raves parties, l’ecstasy et les bits numériques en moins. Par manque de tubes et de figures glamour, cette musique peine pourtant à atteindre un public international. Rares sont les musiciens qui à l’instar de Mauro Durante et ses complices réussissent à en conjuguer l’essence sauvage avec une musicalité sans failles.

 

Fondé en 1975 par Daniele et Rina Durante, Canzoniere Grecanico Salentino est dirigé depuis 2007 par leur fils qui manie aussi bien le tambourin, le violon que le chant. Les compagnons de Mauro jonglent aussi avec les instruments, tamburello pour tous mais aussi guitares pour Luca Tarantino, instruments à vent pour Giulio Bianco, accordéon pour Massimiliano Morabito, voix de tête pour Maria Mazotta, rauque et terrienne pour Giancarlo Paglialunga, danse sensuelle et transcendante pour Silvia Perrone. Chacun garde un espace bien défini dans lequel les timbres et les couleurs s’harmonisent en de savoureux contrastes. Habile et inspiré l’ensemble respecte un large spectre sonore, un groove inaltérable et des nuances subtiles. La pizzica endiablée laisse parfois la place à la douceur mélodique de quelques nobles chansons d’amour. Ils revisitent le répertoire ou créent dans le même élan de nouveaux morceaux en utilisant le Griko Salentino. Cette langue dérivée du grec ancien est un souvenir d’une antique appartenance de la région à l’impérialisme helénique. Ce particularisme linguistique, ailleurs en voie de disparition, n’empêche nullement le groupe d’entrer en parfaite résonance avec l’époque. Les instruments traditionnels cohabitent avec l’innovation technologique, l’esprit Roots tend la main à une modernité méticuleuse.

Sans rien perdre de sa sensualité sans jamais cesser de conduire vers la transe leur pizzica pourrait bien contaminer le reste du monde comme elle l’a fait avec les spectateurs du Babel Med Music 2011.

 


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© Giulio Bianco 2021